Archives Mensuelles: octobre 2012

Carte postale de vacances.

L‘auteur de ce blog se lève, s’étire et constate que ses bras touchent le plafond , se rassoit puis jette un œil un peu torve sur les copies des 5°6. Il se demande s’il est véritablement en vacances, allume sa première cigarette de la journée. C’est un prof.

Introduction alternative :

Cette élève de 4°3 : Monsieur, ça sert à quoi, ce qu’on fait ?

Lui : À rien.

Cette élève de 4°3 : Mais en vrai ? Ça sert à quoi ?

Lui : À passer le temps en attendant de mourir.

Cette élève de 4°3 : …

Mon métier est une vocation paraît-il. C’est bien, les vocations, ça évite d’évoquer les sujets qui fâchent. Quand ton métier n’est pas vraiment un métier, ça évite d’être vindicatif sur les conditions de son exercice ou sur la qualité de la rémunération.

Mon métier est le plus beau métier du monde, paraît-il. Et cette simple affirmation prouve de manière logique que les profs sont une sacrée bande de branleurs, pour être si souvent en grève sans mesurer leur chance. En plus, ils ne travaillent que 18h par semaine… en vertu d’un décret de 1950 selon lequel à une heure de cours correspond 1h30 de travail en amont ( préparation de cours, formation …) et en aval (correction de copies …). Tu comprends pourquoi on a plus de vacances que toi ? Je dis ça, je dis rien.

Mon métier se donne pour mission de former des citoyens, paraît-il. Mais dans une société de chômage de masse, on le rend responsable de l’échec de toute une société. Combien de fois ai-je entendu que si trop de jeunes ne connaissent pas l’accès à l’emploi, c’est parce qu’ils n’ont pas été correctement formés par l’école. Ce n’est pas l’école de la République qui nous emploie aujourd’hui, c’est l’école du Medef, qui réclame que nous sous-traitions une formation dont le patronat refuse aujourd’hui de s’acquitter, en dépit du code du travail, supposé garantir ce droit à la formation continue.

Mon métier est de faire réussir tous les élèves, sans tenir compte des conditions sociales de l’enseignement ou de l’apprentissage. Il faut que chaque enfant obtienne le brevet, le bac, et tant qu’à faire un diplôme universitaire. Et pour ça, on est prêt à tout, assouplir les consignes de corrections des examens ou mépriser les savoirs classiques. Un cours d’espagnol, aujourd’hui, doit apprendre à l’élève à draguer dans les bodegas de Benidorm. La civilisation latino-américaine : on verra si on a le temps. Le latin : plus personne ne le parle. Les mathématiques : du moment que les élèves comprennent à peu près la proportionnalité, tout va bien. Les arts : certains élèves de mon collège n’ont pas de prof depuis la rentrée, personne ne réagit.

Calvin & Hobbes

Mon métier échoue jusque dans cette mission simple : bousculer les certitudes et créer les conditions de l’émancipation. Armée de fonctionnaires, nous faisons effectivement fonctionner un État qui n’a de cesse d’opprimer la classe ouvrière. Faute de moyens, faute de projet sérieux, nous ne créons que l’illusion de l’émancipation et la reproduction sociale des inégalités.

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Le PS, le fascisme, et les courbes de Gauss

Je ne te surprendrai pas, ami lecteur, dont la seule présence sur cette page souligne à quel point tu es un être sur-évolué, en affirmant que dans une classe, disons, de Terminale, la répartition des notes suit une courbe de Gauss. En gros, une majorité de moyens, un petit peu de faibles et de forts, et très peu de très faibles et de très forts. Ce qui est rigolo avec les courbes de Gauss, c’est que d’une classe à l’autre, les courbes de Gauss sont superposables, ce qui signifie, en gros, qu’un 18/20 n’a pas la même signification au lycée Janson de Sailly (Paris 16ème) et au lycée Darchicourt (Hénin-Beaumont). Rien de dramatique : celui qui a 18 à Hénin-Beaumont a toutes les chances de faire une brillante carrière de professeur du second degré, quelque part entre Stains et Ivry sur Seine.

Une courbe de Gauss.

Dans les partis politiques, c’est un peu la même chose. Il y a une aile droite et une aile gauche, sauf au Modem où on a juste du plomb dans l’aile. Ainsi, même l’UMP conserve quelques modérés, et le PS présente une motion 3 à son congrès, preuve que lui aussi possède son aile gauche. Est-il pour autant un parti de gauche ? Manifestement non : ce qui en restait (de gauche au PS) est parti il y a bien longtemps pour fonder le Parti de Gauche (vous voyez, c’est limpide!). Et ceux qui se réclament encore de la gauche au PS sont soit des politicards arrivistes, soit de doux rêveurs. Dans le parti du gouvernement, la notion de gauche ne peut se comprendre que comme « relativement à la ligne dominante », laquelle est de droite.

Cette problématique, pourtant, continue de faire débat en nos rangs, et j’ai assisté l’autre soir à un nouvel échange pour déterminer si « oui ou merde, le PS est de gauche ». Pour moi, devant la confusion des termes gauche et droite, je choisis de m’en détacher et de considérer le PS pour ce qu’il est : un parti de la bourgeoisie, un ennemi de classes. Mais le divorce n’étant pas tout à fait consommé entre le PS et la gauche, les discours manquent parfois de cohérence. « N’oublions pas que l’ennemi principal reste la droite, et derrière elle l’extrême-droite » déclarait l’un d’entre nous. C’est une erreur. L’ennemi, c’est le capitalisme qui se matérialise dans les gouvernements qui le défendent. L’ennemi, c’est aujourd’hui Hollande et sa clique, comme hier Sarkozy et ses nervis déguisés en ministres. Le fascisme n’est pas un point de vue politique, c’est la négation de l’Homme. Il se combat en menant des politiques de gauche, pas autrement. Et force est de constater que le fascisme reprend du poil de la bête dans notre beau pays, à coup de pains au chocolat, de pogroms et de nostalgie d’une France qui n’a jamais véritablement existé. J’en passe, en relevant au passage l’incompétence d’un parti de la majorité qui pense que mettre à sa tête une figure notoire de SOS Racisme sera suffisant !

Quelqu’un disait que le fascisme était le moyen trouvé par la petite bourgeoisie de régler la question de la crise à coup de mitraillettes. Pour battre le fascisme, nous devrons donc fonder une nouvelle république, soucieuse des intérêts des travailleurs. Cela s’appelle faire de la politique, et ça passe par le combat contre un gouvernement qui est aujourd’hui l’ennemi numéro 1 de la classe ouvrière. Pour les fascistes, si le premier travail échoue, il ne restera tôt ou tard que les mitraillettes.

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Radiohead @Bercy – 10/12/12

Pour ceux que j’aurais croisés s’ils m’avaient prévenu de leur présence !

Que de concerts depuis un peu plus d’un an que je vis à Paris. En cette soirée de vendredi, après deux semaines fatigantes qui m’ont pas mal éloigné de l’écriture, un début de crève qui n’a rien arrangé, je me complais à en faire un petit bilan. Quelques très bons moments, avec Kasabian au Zénith, Shaka Ponk à l’Olympia, Green Day à Rock en Seine ou encore Thiéfaine à la Fête de l’Huma. Mais au bout du compte, je n’ai pas encore vécu de ces spectacles qui restent gravés dans les mémoires. Rien de comparable au concert de Placebo à Lille le 12 avril 2001, ni à celui de Muse à Bercy le 18 novembre 2003. Bercy, justement, c’est là que je me rends ce soir, pour y voir un groupe découvert alors que j’étais en Seconde 4 au lycée Picasso. OK Computer, grâce à toi, j’en ai dragué des lycéennes, puis des étudiantes. Mais pas que. Grâce à toi, j’ai appris à jouer de la guitare sans overdrive ni distorsion. C’est bien de Radiohead dont je parle, un des derniers groupes qui soit parvenu à connaître un succès planétaire tout en conservant son intégrité artistique, en s’autorisant toutes les prises de risque, presque toujours avec talent. Je me souviens de la première fois que j’ai entendu Everything in its right place, un matin sur France Inter, en sortant de la douche. Je me souviens de la veille de mon oral de latin au bac, où j’avais dit à ma sœur : « C’est trop tard pour réviser, en revanche Radiohead vient de sortir Amnesiac, si tu me conduis au magasin aujourd’hui, ils auront peut-être encore l’édition collector ».

Amnesiac, l’édition collector

L’enjeu est donc de taille, surtout après la soirée cauchemardesque de Muse à l’Olympia. Cette fois, le lieu est moins accueillant, et avec l’amie qui m’accompagne, nous déplorons l’absence de vestiaire et pire, nous nous demandons où est ce putain d’accès à la fosse. Un concert de Radiohead assis, c’est hors de question ! Bercy, je n’y ai pas mis les pieds depuis 2003, et pour des raisons évidentes, ça ne me manque pas tellement. Quiconque aime la musique live sait que la qualité du son y est telle que c’est probablement le pire endroit où aller voir un concert à Paris. Qu’importe, quand c’est le seul choix proposé, on fait contre mauvaise fortune bon cœur.

Bref, nous y voilà, avec cette vieille amie à qui je pardonne plus facilement de militer à l’UNSA depuis que je sais que j’ai un copain cédétiste. Le public est plus âgé qu’aux derniers concerts auxquels j’ai assisté, cette fois je fais partie des plus jeunes. Autour de moi, la foule entre 25 et 40 ans est moins agitée que pour un concert de Shaka Ponk, du genre à pratiquer la douce rébellion. Malgré les interdictions, l’espace est vite enfumé par nos cigarettes. Il faut dire qu’il n’y a pas de quoi sanctuariser Bercy. On papote, assis, on attend fébrilement.

Bercy, cette salle qu’on évite autant que possible.

Les lumières s’éteignent une première fois pour offrir la scène à Caribou, groupe d’électro-bruit dont la présence m’insupporte rapidement. C’est toujours pareil avec les premières parties. Soit c’est chouette et on regrette que ce soit si court, soit c’est pénible et on attend en trépignant d’entendre « This is our last song. » Je resterais les bras croisés si ce vomi musical ne me contraignait pas à me boucher les oreilles. Je ne m’en formalise pas, je sais d’expérience qu’une première partie n’engage en rien la prestation à venir.

Les lumières se rallument enfin, le temps des derniers réglages de balance et de mise en place d’artifices visuels. Quand les lumières s’éteignent pour la deuxième fois, sous la clameur de 18,000 personnes, c’est justement cette mise en scène visuelle qui me frappe en premier. J’apprécie la performance musicale, bien sûr, mais sans surprise, Radiohead entame son set par des chansons récentes, que je n’ai pas ou peu écoutées, leurs deux dernières productions m’ayant laissé, il faut bien l’avouer, de marbre. Je ne suis pas encore tout à fait « entré » dans le concert, un géant me bloque la vue de la scène, alors je regarde un peu au dessus, et suis immédiatement conquis par ce qui se joue. Une dizaine d’écrans, comme des petites toiles, sont suspendus au dessus des musiciens, les prises de vue sont parfaites, les mains de Phil Selway tenant fermement ses baguettes, la tête de la basse de Colin Greenwood, l’éternelle mèche de son frère Johnny, l’œil à moitié fermé de Thom Yorke. On se croirait au Louvre, à ceci près que les couloirs de la renaissance italienne sont surchargés par trop de toiles. Ici, la proportion est parfaite.

L’image, à la hauteur du son…

Très vite, avec l’aide du batteur de Portishead, présent en tant que musicien additionnel sur la tournée, Phil Selway déclenche ces percussions caractéristiques de There, there. Ed O’Brien a lui aussi troqué son médiator contre des baguettes, Thom Yorke le remplaçant à la guitare. La puissance de la chanson me frappe comme elle m’avait frappée dès sa première écoute. Je revois ce vieil ami, il y a près de dix ans, m’apprenant les bases de cette chanson, et j’entre dans une espèce de transe, solitude heureuse au milieu d’une foule conquise. « We’re all accidents, waiting to happen… » Je bondis comme un cabri, j’ai les larmes aux yeux.

Dès lors, je réclame que ne soient jouées que des chansons antérieures à l’album Hail to the thief. À la fin de chaque chanson, je me tourne vers ma complice du jour : « Et maintenant, Paranoid Android ! » Je ne suis pas exaucé, mais je redécouvre avec la joie du live certains morceaux qui me paraissaient fades dans leur version studio. Et puis, malgré tout, les musiciens d’Oxford ne sont pas avares de titres plus anciens. J’entends alors cette ligne de basse lancinante, un peu haletante, comme hachée par les interférences d’une mauvaise radio. Je deviens incontrôlable : « Oh putain ! The gloaming ! » À ce stade, je passerais inaperçu à une réunion d’autistes. Cette chanson a sur moi l’effet d’un bon vieux buvard à l’ancienne. À voir Johnny Greenwood s’amuser avec son Mac, j’ai peine à affirmer que c’est du 100% naturel, mais presque.

Et puis très vite, on fait un nouveau saut dans le temps, avec  I might be wrong, suivie de près par You and whose army. Cette fausse musique douce. On rentre à mes yeux dans ce que Radiohead a produit de meilleur, la parfaite synergie des instruments classiques avec le potentiel électronique. Ce jour où Radiohead a contribué a inventer le post-rock, invention stylistique qui serait heureuse si seulement ils n’étais pas seuls à la maîtriser ! Mais le plus inattendu est à venir. Les premières mesures suscitent mon étonnement, pour ne pas dire circonspection, mais le doute est vite dissipé. Ce n’est pas un vieux tube racorni, mais bien une chanson écoutée mille fois qui vient de démarrer : Planet Telex, le morceau d’ouverture de leur deuxième album, The Bends, sorti en 1995. Passé ce moment unique, je fais à ma voisine la réflexion que la voix de Thom Yorke n’a rien perdu de sa qualité. Elle me rétorque à juste titre qu’elle s’est au contraire améliorée.

The Bends – 1995

On n’a pas le temps de souffler qu’on retrouve l’album Kid A, avec le très célèbre National Anthem, moment de pure musique électronique. Cette ligne de basse brutale, violente s’associe à une voix fragile qui sonne comme un appel au secours. On en prend plein les oreilles et plein les yeux, le souffle est coupé, et on peine à le retrouver, tant les artistes sur scène, eux, n’en manquent pas. Je réclame à nouveau Paranoid Android, puis j’assiste à un énième changement d’instruments. C’est alors que je vois Thom saisir une guitare acoustique. « Ah ». Johnny récupère sa fameuse Telecaster. « Ah ». Thom regarde le public. « Ah ! Ah ! Ah ! » Ça y est. La foule désormais en délire est prête à reprendre en chœur la plus belle chanson écrite dans les années 90. Six minutes d’une dissertation musicale en trois parties. Et 18,000 personnes à l’unisson. Et les créateurs de cette bombe le savent bien, décidant alors de quitter la scène. J’ai presque envie de dire Coïtus Interruptus, et ils ont bien raison.

Quand ils reviennent, on se dit que seul un morceau de OK Computer peut décemment succéder à Paranoid Android, et eux-mêmes semblent l’avoir compris. Alors les larmes à nouveau nous coulent des yeux, pour la montée en puissance d’Exit Music. « And now, we are one, in everlasting peace… » Encore quelques morceaux, on les croit repartis pour deux heures de concert, ils quittent à nouveau la scène, la réinvestissent, la quittent après avoir interprété Everything in its right place, puis se décident à nous dire une dernière fois au revoir au son joyeusement pop de Idioteque.

Voilà, j’ai vu Radiohead. C’était la première fois. 2H30, c’était trop court. J’en ai plein les yeux, plein les oreilles surtout. Dès que j’en ai l’occasion, je remets ça.

Bonus : La set-list du concert.

  1. Lotus Flower
  2. Bloom
  3. There, there
  4. The daily mail
  5. Myxomatosis
  6. Bodysnatchers
  7. The gloaming
  8. Separator
  9. I might be wrong
  10. Videotape
  11. You and whose army
  12. Nude
  13. Planet telex
  14. The national anthem
  15. Feral
  16. Paranoid Android

1st Encore :

  1. Exit Music (for a film)
  2. Staircase
  3. Morning Mr Magpie
  4. Weird fishes/Arpeggi
  5. Reckoner

2nd Encore :

  1. Give up the ghost
  2. Everything in its right place

3rd Encore :

  1. Idioteque
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Leur règle est d’or, notre mépris est de platine

Ils ont voté contre alors qu’ils étaient pour. Traîtres parmi les traîtres, voici, par ordre alphabétique, la liste des députés de cette aile gauche fictive du Parti soi-disant Socialiste qui ont voté mardi contre le TSCG et jeudi pour la loi instituant la fameuse « règle d’or » :

  • Pouria Amirshahi : neuvième circonscription des Français de l’étranger (Afrique du Nord et de l’Ouest)
  • Jean-Pierre Blazy : neuvième circonscription du Val d’Oise
  • Fanélie Carrey Conte : quinzième circonscription de Paris (en remplacement de Georges Pau-Langevin, ministre de la réussite éducative)
  • Nathalie Chabanne : deuxième circonscription des Pyrénées Atlantiques (les électeurs de Bayrou peuvent se rassurer)
  • Pascal Cherki : onzième circonscription de Paris
  • Henri Emmanuelli : troisième circonscription des Landes
  • Linda Gourjade : troisième circonscription du Tarn
  • Jérôme Guedj : sixième circonscription de l’Essonne (en remplacement de François Lamy, ministre de la Ville, officieusement en charge de la relance de l’économie – secteur de la fabrication de parquets – au conseil général de l’Essonne, cumulard notoire, étonnamment à l’heure pour les deux votes)
  • Razzy Hammadi : septième circonscription de la Seine-Saint-Denis (élu fictif bien connu des lecteurs des chroniques montreuilloises)
  • Mathieu Hanotin : deuxième circonscription de Seine-Saint-Denis (meneur avec le précédent de l’OPA contre le Front de Gauche dans ce département lors des dernières élections)
  • Chaynesse Khirouni : première circonscription de Meurthe-et-Moselle
  • Michel Pouzol : troisième circonscription de l’Essonne
  • Marie-Line Reynaud : deuxième circonscription de la Charente
  • Denys Robiliard : première circonscription du Loir-et-Cher
  • Barbara Romagnan première circonscription du Doubs

La masse des godillots ne mérite même plus qu’on s’intéresse à elle, ils sont les renégats de la démocratie en France, mais la liste ci-dessus donne à réfléchir. Quelle est la démarche de ces parlementaires qui disent non le mardi et oui le mercredi ? Sont-ils stupides de produire deux votes différents sur des éléments qui vont pourtant de pair ? Qui sont-ils, ces nouveaux Dumouriez, ces Lafayette sans gloire ? Ils sont les meilleurs représentants de ce vieux monde appelé à disparaître, et je me ferai une joie d’accélérer la disparition de cette caste d’arrivistes pour qui la lutte des classes n’a jamais été autre chose qu’un « élément de langage » à même de servir leur lutte des places.

Ces cumulards (de fait ou à venir, 2014, c’est déjà demain!) n’ont donc voté contre le TSCG que pour pouvoir prétendre aux électeurs qu’ils tenteront bientôt de séduire qu’ils sont pour une Europe Sociale, plus juste, etc. Mais dans l’immédiat, ils connaissent et reconnaissent la main qui les nourrit (le Medef et autres excités du même genre) et celle qui pourrait leur offrir de quoi s’asseoir : un strapontin ministériel leur suffira.

Bravo à vous, mesdames et messieurs, irresponsables commettants. Nous n’oublierons pas les choix faits au nom d’un peuple qui réclamait un référendum.

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Le compromis « gagnant-gagnant », dernier gag du gouvernement

Qu’est-ce au juste que l’État bourgeois ? C’est, je crois, une photo instantanée des rapports de force inhérents aux antagonismes de classe. Gardien de l’outil capitaliste au service de la classe dominante, l’État n’est pas un objet fixe et immuable, il est le reflet des progrès de la classe ouvrière vers l’abolition du capitalisme, ou celui de sa régression. Il est la laisse qu’utilise la classe dominante pour asseoir sa domination envers la classe opprimée, et comme toute laisse, sa longueur peut être modulée. Poussons plus loin l’analogie, en se demandant comment se joue cette modulation ? Concrètement, au sein de l’État bourgeois, c’est d’abord le législateur qui choisit la taille de la laisse, selon deux critères : le rapport de forces impulsé par les travailleurs, par l’action syndicale notamment, et le choix idéologique de départ du législateur lui-même.

Aujourd’hui, l’assemblée godillot a confié le pouvoir législatif à l’exécutif gouvernemental, montrant ainsi ô combien illusoire est la séparation des pouvoirs théorisée par Montesquieu. Le pouvoir est un pouvoir de classes et en tant que tel, ne se partage pas. Pour ceux qui en doutaient encore, le premier bilan de l’équipe en place est sans équivoque. Élu sur un programme simple : ne pas être l’exécutif sortant, il en poursuit la politique à tous les niveaux. Traitement inhumain de l’étranger et de l’immigré, en particulier s’il est Rom, criminalisation des responsables syndicaux, austérité programmée, mise au garde à vous devant le patronat, Nicolas Sarkozy est bel et bien toujours au pouvoir. Jean-Luc Mélenchon n’a pas été élu en mai dernier, ce n’est en aucun cas une surprise, l’État bourgeois a pour mission première la survie du système capitaliste, et donc son auto-conservation, il est donc logique que tout soit fait pour empêcher quiconque ose le contester de prendre le pouvoir : une idéologie dominante au service de la classe dominante.

C’est dans ce contexte, où la soi-disant gauche est devenue une autre droite, au point de faire descendre dans la rue des milliers de citoyens à l’appel d’organisations précisément de gauche, que s’ouvrent aujourd’hui la énième renégociation du droit du travail. C’est un enjeu majeur pour la bourgeoisie, au même titre que le TSCG. Il s’agit ici de deux perspectives d’une même question. Remettre en cause le fruit de deux luttes historiques menées par la classe ouvrière en France : celle du Front Populaire et des grèves qui ont accompagné son accession au pouvoir dans les années 30, et celle de la résistance française, qui vit les communistes majoritaires à l’assemblée, après que la bourgeoisie française se fut enrichie par sa complicité avec l’occupant nazi. Le TSCG, c’est en premier lieu l’attaque envers les services publics, garants d’une solidarité nationale, et privant le Capital d’un marché extrêmement juteux, quant au droit du travail, on touche à la nature même des rapports de classe. Le projet du CNR n’est pas à proprement parler anti-capitaliste, mais il permet « d’allonger la laisse ». La liberté engage l’Homme à plus de libertés, et ouvre le champ à une émancipation des ouvriers, débarrassée de l’État bourgeois. C’est ici que ma métaphore de la laisse montre ses limites. Une bête se contentera d’une laisse assez longue, alors que chez l’Homme, allonger la laisse lui laisse entrevoir ce que serait un monde sans celle-ci. À l’inverse, raccourcir la laisse de l’Homme, c’est le priver d’espoir, et donc favoriser le fascisme : il n’y a donc à gauche pas pire politique que la politique du pire.

Revenons-en à nos moutons. Des « négociations » tripartites s’ouvrent aujourd’hui entre le gouvernement, les syndicats et les organisations patronales afin d’opérer une refonte du code du travail. Pour Hollande, il s’agit d’obtenir un compromis « gagnant-gagnant ». Si je pensais naïf le président de la république, je m’exclamerais « Belle chimère que voilà ! », que de vouloir réconcilier le loup et l’agneau. En réalité, l’action gouvernementale depuis cinq mois nous montre qu’il ne s’agit là que d’un élément de langage de plus dans la terminologie dominante : faire avaler aux travailleurs qu’il n’y a pas de luttes des classes. Ce qui est bon pour les patrons, qui tentent sans cesse d’être assimilés à l’entreprise, est forcément mauvais pour le travailleur, et réciproquement. Mais une analyse superficielle de la situation suffit, outre cette expression qui fait rire (jaune), à être convaincu qu’il s’agit d’une table ronde à deux contre un : le patronat et le gouvernement bourgeois d’un côté, les travailleurs de l’autre. Comment en effet, pourra-t-on concilier la réduction de la dette imposée par le TSCG, tout en concédant de nouveaux cadeaux aux patrons, via une baisse des soi-disant « charges » patronales ? La réponse est simple : en diminuant les dépenses de services publics, celles qui profitent à tous, et en rasant encore un peu plus court les travailleurs par des prélèvements iniques.

En votant Mélenchon en mai, Front de Gauche aux législatives puis en adhérant au PG, ce n’est pas pour déléguer mes convictions à d’autre, mais pour mettre en place les conditions d’une alternative à gauche. Je suis Front de Gauche avant d’être Parti de Gauche, car il est grand temps de recréer un grand parti des travailleurs, outil nécessaire de notre émancipation. On ne décrète pas l’existence, encore moins l’influence d’un nouveau parti bolchevique, on le construit petit à petit. D’abord en construisant l’unité autour de ce qui nous rassemble, ensuite en étant présent, au quotidien, dans les luttes concrètes des travailleurs.

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Muse : L’être (en retard) et (surtout) le néant.

J’aurais pu vous parler du dernier album de Muse, mais ami lecteur, je t’aime. Même toi, le trotskiste. Non, pas toi le ségoléniste : je te connais, tu ne sais même pas lire.

Donc, plutôt que de subir « The second law », ce qui vous rappellera immanquablement ces heures passées à potasser les fluides incompressibles et l’expérience de Torricelli avec pour seule consolation le moment où Le Mouv’ diffusait une chanson intitulée Bliss, j’ai décidé de vous parler musique.

Aujourd’hui, moment détente, où je ne peux que vous suggérer d’écouter à nouveau ces petits bijoux déjà appréciés cent fois. Ceux qui veulent de la douceur, je les invite à choisir Grace, de Jeff Buckley, ou bien OK Computer de Radiohead. Ceux qui veulent quelque chose d’un peu plus rock, je leur recommande l’album Mutter de Rammstein, ou le très épicé Evil Empire de Rage against the machine. Pour ceux qui veulent quelque chose de plus old-school, pourquoi ne pas se replonger dans le troisième album de Led Zeppelin ou le chef d’œuvre d’AC/DC, Back in Black. Si vous êtes dans un délire punk, London Calling des Clash fera l’affaire, mais on peut choisir Crossing the Red sea with the Adverts, du groupe éponyme. Enfin, les amateurs de le francophonie pourront se décider entre Tostaky de Noir Désir, Répression de Trust ou encore 15ème round de Bernard Lavilliers. Cette liste n’a bien entendu aucune prétention d’exhaustivité, et toute suggestion est la bienvenue.

J’ai aussi failli vous parler de la prestation de Muse à l’Olympia, ce mardi 2 octobre, mais je préfère évoquer les joies de la musique live. On n’hésitera pas à écouter à nouveau Made in Japan de Deep Purple, Killer Queen, par la formation de Freddy Mercury, mais on pourra aussi lire la supberbe chronique de Benoît sur les Pogues, ou plus simplement acheter un billet pour Skunk Anansie, le 24 novembre prochain au Zénith.

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Fralib, le soleil, et 80,000 copains.

Parmi les choses agréables de la vie, il y a les dimanches ensoleillés, quand la canicule est partie. C’est l’occasion de balades entre amis ou en famille, éventuellement d’un verre ou d’un croque-monsieur en terrasse. Une fois n’est pas coutume au mois de septembre, la journée d’hier était de ces dimanches. J’avais donc décidé d’y retrouver quelques amis, vers 13h30, Place de la Nation.

Vers midi, j’arrive donc sur le quai du RER, quelque part au nord de l’Essonne, et m’engouffre dans le premier train à destination de Paris. À peine entré, je reconnais dans un des carrés de sièges quelques amis qui eux aussi me reconnaissent. Chacun donne son prénom, mais leurs autocollants réclamant un référendum et mon drapeau du Parti de Gauche ont suffi à nous faire comprendre que notre destination était identique. La discussion s’installe autour du TSCG, de la politique catastrophique du gouvernement en place, des travailleurs en lutte un peu partout. Discussion naturelle dans ce genre de conditions. Cela se poursuit jusqu’à au changement de quai à Châtelet ainsi que dans le deuxième train qui nous emmène à Nation. Nos chemins se séparent ici.

Remonté à la surface, je me dirige vers le ballon PG, convaincu que c’est là que je vais croiser le plus de têtes connues. J’ai en effet rapidement l’occasion de saluer quelques visages déjà rencontrés ici ou là. Une fois encore, on ne retient pas tous les prénoms, mais les visages amicaux restent en mémoire. Je me dirige alors vers le carré de tête de notre cortège dominical, pas dans l’espoir d’y croiser une quelconque célébrité, c’est les jeu des journalistes, mais de saluer les camarades du service d’ordre. J’échange quelques mots, je pars m’acheter deux merguez glissées dans une baguette pas très fraîche, et puis j’aperçois Pierre (ou lui m’aperçoit, je ne sais plus) en compagnie de Philippe et Olga, puis on retrouve José et Hélène, en compagnie des « Fralib », « Fra-libres » entend-on parfois dans la bouche de gens dont la langue fourche joliment. Ils défilent parmi les premiers, ces travailleurs symbole d’une unité et d’une résolution sans faille contre l’injustice faite aux ouvriers. Je ne les quitterai qu’une fois arrivé Place d’Italie.

 

Défiler avec « Fralib », ça rend une manifestation particulièrement savoureuse. Ils ne sont pas sectaires, manifestant ensemble, toutes les bonnes volontés sont les bienvenues. Mon camarade José, du PG, tient une pancarte « Boycott Lipton » au premier rang devant la banderole, Éric Corbeaux, du PCF, animateur du Front des Luttes, tient avec eux la banderole « Unilever doit payer », on me demande de participer à la mise en place d’un cordon ayant pour but de rendre cette banderole visible par tous. Sur notre chemin, ceux qui sont la fierté de Gémenos sont souvent applaudis par la foule agglutinée sur les côtés, certains viennent nous voir, pour les encourager ou les féliciter. Moment intimidant, voire gênant pour moi qui me sent usurpateur de leur lutte. Chaque fois qu’on vient me souhaiter du courage, je m’empresse de préciser que je ne suis là qu’en sous-traitance amicale, que ce sont ceux autour de moi qui sont les véritables héros. Les camarades, eux, ont compris l’essentiel. On n’obtient rien sans unité, et on n’obtient pas l’unité sans joie. Les slogans ne sont jamais pleurnichards, et cèdent parfois la place à des commentaires avisés sur la dégelée de l’OM à Valenciennes. La détermination n’a de sens que si la bonne humeur domine.

 

Nous arrivons vers 16h sur la Place d’Italie, on prend quelques photos, on grignote un sandwich, et puis les camarades provençaux repartent en direction de la Gare de Lyon, il est l’heure pour eux de rejoindre les Bouches du Rhône. Je croise encore quelques camarades que je connais, un collègue de travail « toujours présent dans les mauvais coups » (pour le citer), on remonte le cortège en sens inverse, celui des syndicats, celui du Front de Gauche, celui du NPA, et en queue de cortège, le POI, improvisant un meeting en haut du Boulevard de l’Hôpital, appelant à maintenir l’unité des forces de gauche rassemblées aujourd’hui. Le camarade au micro dit tout haut ce que nous savons déjà tous : le traité mortifère sera voté. Qu’à cela ne tienne, les comités contre la ratification du TSCG doivent devenir naturellement des comités pour son abrogation. Ce sera le mot de la fin, et il me convient parfaitement.

Une pause en terrasse, on prolonge la discussion pendant une heure encore, puis retour en banlieue, un peu vidé, et surtout convaincu que ce combat là ne fait que commencer. Aujourd’hui j’ai vu 80,000 copains. ON LÂCHE RIEN !

En bonus : une vidéo faite par un camarade sur l’ensemble du cortège (et même qu’on me voit dedans) :

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