En terrasse avec Arnaud Montebourg

Quand Arnaud arrive sur la terrasse heureusement couverte du Gévaudan, j’écrase ma cinquième cigarette, mon troisième café refroidissant devant moi. Il est en retard. Je lui fais remarquer avant même qu’il ne s’assoie. Loin de se chercher des excuses, il me rétorque qu’il était en train de fumer un cigare long comme un barreau de chaise avec le député fictif et l’homme à la mèche, et que ce dernier lui a indiqué qu’un homme important ne peut pas se permettre d’être à l’heure à un rendez-vous. Sans doute cherche-t-il à m’indiquer implicitement que l’aile gauche du Parti soi-disant Socialiste, il y croit. Silence, Arnaud s’assoit. L’espace de quelques secondes, l’homme qui ne s’aime pas contemple avec moi la mairie de Montreuil, demeure provisoire – espérons-le – de celle qui n’est pas folle (sic). Je romps la trêve, car mes revenus ne sont pas garantis par des indemnités ministérielles. Mon temps est précieux, et pire, j’ai un travail qui exige de rendre des comptes. Il est temps de démarrer l’interview.

Le Gévaudan, à Montreuil

Le Gévaudan, à Montreuil

Arnaud, ton gouvernement a ratifié le TSCG il y a de ça quelques mois. La première conséquence est la dégradation des services publics. Dernier exemple en date, la paralysie d’une grande partie du pays suite à d’importantes chutes de neige. Tu penses pas que vous avez un peu merdé ?

Oh ! Arrêtons tout de suite avec la neige ! Pour une fois que les vacances tombent en mars, c’était pas gagné d’avoir la neige à Courchevel ! Maintenant que je suis quelqu’un d’important, je suis le seul parisien qui ne peut plus s’isoler à Megève quand il fait froid ! C’est plutôt moi qui suis à plaindre.

Justement, les vacances, il n’y a plus beaucoup de travailleurs qui en prennent. Pour nous, en Seine Saint-Denis, le dossier PSA, c’est quand même quelque chose, je ne t’apprends rien.

Je te vois venir, tu vas m’accuser de tous les maux. Mais j’ai tout fait dans l’affaire PSA. C’est moi qui ait appelé les syndicats à une attitude responsable ! Tout le reste, c’est de la manipulation de la CGT et de l’extrême gauche. Avec le pacte de compétitivité mis en place suite au rapport Gallois, c’est 20 milliards de cadeaux supplémentaires aux entreprises. Grâce à moi, elles ont toutes les cartes en mains pour investir et relancer l’économie !

Tu penses vraiment qu’il s’agit là de choix politiques de gauche ? D’un côté des travailleurs dont on criminalise chaque revendication, et de l’autre un patronat toujours plus revanchard à qui l’on fait toujours plus de cadeaux.

Il faut véritablement se débarrasser de cette vision de classes. Nous sommes tous dans le même bateau. Moi, par exemple, je n’ai pas pu partir en vacances sous prétexte que je suis au gouvernement. Pourtant, je ne suis pas le premier à le dire, le politique ne peut pas tout. Ce n’est tout de même pas de ma faute si c’est la crise !

Mais même en admettant que le politique ne peut pas tout, ce qui est déjà discutable, pourquoi toujours prendre le parti des possédants contre les travailleurs ? Ton gouvernement se rend en masse lécher la main du MEDEF mais envoie les CRS aux ouvriers de Mittal et de Goodyear !

Je le répète, la lutte des classes ça n’existe pas ! Si on s’est précipité chez Parisot, c’est seulement parce qu’on bouffe super bien à chaque fois. Les barbecues de la CGT à base de pneus flambés, très peu pour moi.

Il faudrait arrêter de répéter tout ce que dit Jérôme Cahuzac, Thomas Pizard est déjà intenable !

Mais ce n’est pas seulement Jérôme Cahuzac qui le dit, Fleur le dit aussi. Et puis Fleur, c’est quelque chose, quand même ! Elle s’y connaît en pauvres, elle est de Montreuil. En plus, avec sa tête qui fait peur aux enfants, on peut pas l’accuser d’avoir été recrutée au gouvernement pour son physique !

C’est complètement sexiste ! Tu ne crains pas que de tels propos t’isolent au sein du gouvernement ?

Bof. Je te rappelle qu’on a Najat au ministère des Droits des Femmes. C’est pas comme si au PS, on prenait cette question au sérieux. Elle a quand même osé dire à Sophia que l’ANI était un élément émancipateur pour les femmes. Ça situe le niveau. Et puis on ne peut pas m’accuser de sexisme, j’ai soutenu la dinde du Poitou en 2007. Rien que pour ça, je mérite la légion d’honneur !

À ce propos, c’est plutôt curieux d’avoir milité contre le TCE en 2005 puis pour la candidature de Ségolène Royal en 2007. Ta ligne politique, ce ne serait pas, au fond, de voler au secours de la victoire ?

(Arnaud sourit, un peu gêné d’en avoir trop dit, puis avale d’un trait son café) On va devoir s’arrêter là, je suis invité à dîner chez Alain Minc, je ne veux pas être en retard.

Merci à Sophia grâce à qui j’ai eu l’idée de cette interview fictive.

Bonus musical : Jacques Dutronc L’opportuniste

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4 réflexions sur “En terrasse avec Arnaud Montebourg

  1. Jeanne DAUBEZE dit :

    Tu ne fais donc pas partie des blogueurs invités par les ministres…- Montebourg dernièrement – je m’en doutais

    C’est dommage, tu avais les bonnes questions. C’est pas con ça ?

  2. […] questionnaire se trouve également ici. Vous pouvez l’embarquer sur votre propre site internet, ce qui permettra aux thinks tanks de recueillir davantage de données et donc […]

  3. […] les blogueurs de « l’ultra-gauche », favorables à Menilmontanium, qui répliquèrent violemment en dénonçant le blogage moutonnier de leurs assaillants au service d’un pouvoir qui […]

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